Rassemblées dans un nouveau livre de Gilles Peterson et Stuart Baker intitulé Cuba: Music and Revolution: Original Album Cover Art of Cuban Music, ces pochettes des années 59-90 documentent le bouleversement identitaire de l’île après la révolution cubaine menée par Fidel Castro.
Ils ont rarement été vus, ni même entendus en dehors de Cuba. Ces disques recèlent un moment historique de Cuba, celui du passage de paradis touristique des années 1950 à l’État socialiste dirigé par le régime castriste. C’était un 1er janvier 1959, Fidel Castro et ses combattants du Mouvement du 26 juillet entrent victorieux à Santiago de Cuba, bien décidés à mettre en place les mesures révolutionnaires dont rêvaient de nombreux cubains pour faire face à l’impérialisme américain. Mais les choses se passent autrement. Bien que les prix des loyers et de l’électricité aient baissé, que toutes les plages soient devenues publiques, le chômage résorbé et le système d’éducation et de santé amélioré, la dictature se met peu à peu en place pour se concentrer dans les mains d’un seul homme, Fidel Castro. Les partis politiques opposés sont dissous et certains responsables sont châtier, la Compagnie cubaine des téléphones, monopole yankee, passe sous le contrôle de l’État et des milices nationales révolutionnaires sont constituées. Cuba se transforme alors en dictature socialiste.
Ce moment dramatique transparaît dans l’histoire de ces pochettes de disques cubains. Après la Révolution cubaine de 1959, les États-Unis ont imposé un embargo commercial qui existe encore aujourd’hui. Par conséquent, les centaines de disques cubains présentés ici ont rarement été vus en dehors de Cuba. Parmi eux, on trouve les illustrations du Directo De Cuba N°3 de Carlos Puebla (1968) 7″, En Finlandia de Paquito D’Rivera (1976) et l’album éponyme du Grupo Sintesis (1981). La musique et les pochettes de ces disques reflètent l’influence politique et esthétique du communisme révolutionnaire et en même temps, conservent le riche héritage culturel de Cuba en matière de sonorités latines. N’oublions pas que la salsa apparue à New York dans les années 70 au sein de la communauté latino-américaine d’Harlem, doit largement son succès à la musique afro-cubaine (son, cha-cha, rumba, bolero, danzon, mambo, etc.) sur laquelle elle repose fondamentalement.
Produit en coopération avec le gouvernement cubain et réalisé en cinq ans, Cuba : Music and Revolution est le tout premier livre consacré à ces disques cubains. En plus de celui-ci, Soul Jazz sortira également un album retraçant l’ascension de la musique cubaine dans les années 70, qui sera également compilé et édité par Peterson et Baker. Pour les présentations, Gilles Peterson, est animateur sur la BBC, propriétaire d’une maison de disques, DJ, collectionneur de disques, fondateur de Worldwide FM et Stuart Baker n’est autre que le fondateur de Soul Jazz Records. Ensemble, ils ont édité deux livres de musique et de design, précédemment salués par la critique : Freedom, Rhythm and Sound – Revolutionary Jazz Cover Art 1965-83 et Bossa Nova and The Rise of Brazilian Music in the 1960s. Cette histoire riche et cachée de la musique cubaine mérite aussi une standing ovation.
Cuba: Music and Revolution: Original Album Cover Art of Cuban Music sera publié par Soul Jazz Books le 2 novembre prochain. Disponible en pré-commande ici.